En 1567, le maire de La Rochelle
était Amator Blandin, le père de la Jeune fille qui avait accueilli
dans notre ville Charles IX sous de déguisement de Diane. Royaliste
et catholique, il vit d'un mauvais œil le gouverneur Chabot de
Jarnac lui donner comme successeur à la mairie un protestant,
François Pontard.
Ce dernier, poussé par les pasteurs
qui menaient une intense propagande et surtout par son ami M.
de Sainte-Hermine, seigneur de la Laigne, voulut faire entrer
La Rochelle dans le camp huguenot.
Le prince de Condé et Coligny,
menacés d'être arrêtés, soulevèrent de nombreuses cilles de France.
Pour éviter que La Rochelle ne suivit cet exemple, le roi Charles
IX donna l'ordre à Chabot de Jarnac de l'occuper militairement.
Au début de 1568, il s'apprêtait
à exécuter cet ordre et avait concentré des troupes dans ce but
à Surgères, quand Pontard et Sainte-Hermine levèrent le masque
; ils firent de La Rochelle une sorte de république indépendante
et calviniste. Les églises de Notre-Dame de Cougnes, Saint-Sauveur
et Saint-Barthelemy furent démolies pour renforcer les murailles,
à l'exception de leurs clochers qui furent transformés en donjon.
Hors de la ville, tout ce qui
aurait pu servir de point de départ à une attaque fut démoli et
la populace en profita pour piller les églises. Une foule de gentilshommes
protestants vint en outre s'installer à La Rochelle. Le capitaine
Trousseau, dit La Belle, fut envoyé à Luçon pour chercher du ravitaillement.
en route par une troupe
catholique, il se voyait battu et s'apprêtait à rendre son épée,
quand les Rochelais vinrent le débloquer. Ils en profitèrent pour
prendre Luçon où les catholiques, réfugiés dans les églises, y
furent massacrés. Peu après, l'île de Ré se déclara pour La Rochelle.
Charles IX confia à Blaise de Montluc le soin de reprendre le
grand port de l'Atlantique.
Les catholiques battirent un parti
huguenot prés de Mirambeau et occupèrent Saintes. Les protestants
des lies de Marennes les attendaient au Pas (c'est à dire au passage
dans les marais) de Saint-Sorlin. Les calvinistes, soldats improvisés,
eurent la maladresse de sortir de leurs retranchements pour attaquer
les troupes catholiques qui les battirent entièrement.
Un des chefs huguenots, Fief-Melin,
gravement blessé de plusieurs coups de hallebarde, gisait dans
un fossé ; un paysan catholique l'y trouva et lui donna de grands
coups de sabots par la tête en disant : " Tu ne mangeras plus
mes poules ! " Ce en quoi il se trompait, car Fief-Melin survécut
et continua à manger les volailles roturières.
Au cours du combat, les catholiques
avaient pris sept drapeaux, dont la bannière blanche du capitaine
Goulènes qui y avait été tué. Montluc s'installa à Marennes où
il reçut la soumission des huguenots de la région, à qui il imposa
une forte amende.
Dans le port de Brouage, Montluc
fit embarquer cinq cent arquebusiers d 'élite sous le commandement
de son neveu Lebaron pour attaquer l'île de Ré. Les catholiques,
une première fois repoussés par le feu de l'ennemi, débarquèrent
ensuite à Ars, que les Rochelais avaient négligé de fortifier.
Un combat terrible eut lieu.
Les protestants battus se réfugièrent
dans l'église de Saint-Martin qui fut prise d'assaut et la garnison
massacrée. Maître de la côte, Montluc se rendit alors à Saint-Jean
d'Angely où il fit sa jonction avec Chabot de Jarnac et le comte
de Lude.
Il s'apprêtait à marcher contre
la Rochelle quand fut signée la paix de Longjumeau. La paix fut
publiée à La Rochelle le 27 mars et célébrée par une fête militaire
; une sorte de citadelle, appelée la Ville Blanche (du nom que
les Anglais donnaient à notre ville) fut attaquée par sept cent
arquebusiers et défendue par la milice de La Rochelle. Le peuple
goûta fort ce spectacle.
Le gouverneur Chabot de Jarnac,
étant rentré dans la ville, en fit bannir Pontard et Sainte-Hermine
mais il ne pût empêcher le conseil d'élire un maire protestant
que Charles IX, dans un désir de conciliation, accepta malgré
ses conseils. Jarnac, furieux, quitta alors La Rochelle.
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